La gamine du South Side, les quartiers blacks et défavorisés de
Chicago, devra s’y faire. Le lendemain de son apparition auprès de son
44e président des Etats-Unis de mari, la presse ne parle que de la
garde-robe de Michelle Obama. Avec Samantha Critchell, la journaliste mode d’Associated Press,
on apprend ainsi que la nouvelle First Lady, vêtue d’une élégante robe
rouge et noire, portait du Narciso Rodriguez, «un styliste apprécié
mais pas mainstream». Celle que l'on surnomme déjà la «Jackie Kennedy
noire» dit souvent: «Je suis une singularité statistique. Je ne suis
absolument pas censée être là.»
Michelle la consciencieuse Apparence et Maison Blanche, la voilà bien loin, Michelle O., 44 ans,
du deux-pièces où elle vivait au sein d'une famille soudée. Son père,
Frazer Robinson, travaille pour la mairie, malgré sa sclérose en
plaques. Maman, secrétaire, va élever Michelle et son frère, Craig.
Mais elle n’a pas la vie d’une Cosette. Elle est d’abord une jeune
fille décidée, plus bûcheuse que brillante, qui va s’en sortir grâce à
son travail (lever à 5h pour faire ses devoirs) et, selon elle, au
talent de basketteur du frangin, star de l’équipe universitaire de
Princeton, où elle-même sera admise en 1981.
Michelle le rocLa scène est connue, on se croirait dans «Nuits blanches à Seattle». En
1989, grande et longiligne avocate dans un cabinet d’affaires de
Chicago après avoir terminé la faculté de droit de Harvard, Michelle
doit s’occuper d’un jeune stagiaire d’été arrivant lui aussi de
Harvard. Ils se jaugent, finissent par aller voir au cinéma le film de
Spike Lee «Do the Right Thing». Pendant la séance, elle lui permet de
caresser son genou, ils s’embrasseront ensuite au magasin de glaces Baskin Robbins
de la 53e rue. Barack et Michelle se marient en 1992, elle va devenir
son «rocher», comme il la surnomme. Elle lui donne une famille, et des
attaches, alors que Barack est d’abord un voyageur qui n’a jamais connu
les affres de la ségrégation.
Elle soupèse toutes ses décisions, joue l’avocat du diable. «Vous
voulez savoir comment Barack se prépare pour un débat?», lâche-t-elle
un jour. «Il lui suffit de passer un peu de temps avec moi, et il est
prêt.» Elle posera ses conditions avant que le couple ne s’engage dans
l’aventure présidentielle, avant d’abandonner son poste de
vice-présidente de l’Hôpital universitaire de Chicago. Mais, à la voir
bondir sur les podiums à la fin de chaque discours de son mari pour lui
donner un petit geste du poing, on comprend comment elle vit: à fond.
Michelle la bonne mère de famille La sarcastique Michelle a dû polir son image
pendant la campagne. Pour habituer le peuple américain à la première
First Lady noire de son histoire, pas question de passer pour une
féministe sèche et acharnée. Elle doit rassurer les électeurs, se
cantonner à une image maternelle, pleine de douceur et de générosité.
Comme Hillary Clinton, elle a l’air très ambitieuse, trop pour
l’électeur. «Elle semble vouloir la Maison Blanche autant que son
mari», a écrit «Newsweek» après les primaires démocrates. Elle doit
calmer sa fougue, multiplie les anecdotes sur ses filles Malia, 10 ans, et Sasha, 7 ans,
à la télévision. Les conseillers de Barack précisent depuis mardi
qu’elle s’occupera des problèmes des femmes défavorisées et des
familles de militaires. Sans bureau dans l’aile réservée au président.
Pour l’instant.