EVRY (AFP) - "Je voulais qu'elle se taise, je lui ai donné un coup de couteau". Josiane Ageon, 54 ans, a raconté vendredi au premier jour de son procès devant la cour d'assise de l'Essonne comment elle a tué sa mère en 1999 et dissimulé son corps pendant six ans dans un réduit servant de séchoir.
L'accusée, une petite femme blonde s'exprimant avec calme, explique d'une voix timide qu'elle s'était installée au printemps 1998 avec deux de ses fils chez sa mère à Palaiseau (Essonne), car elle se heurtait à des difficultés financières, et ne vivait alors que du RMI.
Après les premiers temps où "tout se passait à peu près bien", leurs relations se dégradent, sa mère l'incite à quitter l'appartement.
Liliane Ageon, la victime, se plaint auprès de sa fille du comportement de ses deux garçons, qui se font remarquer par des incivilités, squattant le hall de la résidence, se livrant à divers trafics et commettant des dégradations.
"Elle me reprochait de ne pas avoir eu d'ambition quand j'étais jeune", "elle disait que je n'étais bonne à rien", explique Josiane Ageon.
Le 21 janvier 1999 au matin, une nouvelle dispute éclate. La fille pousse sa mère par les épaules. En tombant, sa tête heurte l'évier. Elle demande à sa fille de l'aide pour se relever. "Elle a continué à me faire des reproches. Je voulais qu'elle se taise, je lui ai donné un coup de couteau" dans le cou, au dessous de l'épaule, raconte l'accusée, d'un ton monotone.
Josiane Ageon s'assied ensuite dans le salon, "dans un état second", puis transporte le corps dans la chambre de sa mère. Pour elle, hors de question d'appeler les secours. "J'avais peur pour mes enfants, je ne voulais pas les abandonner", se souvient-elle. "Le lendemain, j'ai décidé de cacher le corps", poursuit-elle.
Empaqueté dans une housse de moto, des sacs poubelles, entouré de ruban adhésif, le cadavre est caché dans le "séchoir" faisant office de débarras, sous un amas d'objets divers, des livres, des revues, un annuaire téléphonique. Pour éviter les odeurs, Josiane Ageon avait préalablement déversé une bouteille d'amoniac sur la dépouille de sa mère, et disposé des désodorisants à mèche autour.
Elle y placera même une croix en pierre, et descendait parfois au sous-sol, comme l'on se rend au cimetière.
Le corps ne sera retrouvé que le 5 février 2005 par la police, alertée par les deux frères de l'accusée, qui se sont constitués parties civiles. Elle leur avait affirmé que leur mère était morte après une chute due à un malaise.
Jusqu'alors, elle leur avait raconté que leur mère était en vacances aux Antilles, puis qu'elle s'était installée dans le sud de la France avec un ami.
L'avocat général questionne l'accusée sur la raison de ses aveux, après tant d'années de mensonge. "Tout simplement parce que pendant ces six années, je n'ai pas vécu", répond-elle, "c'était devenu intenable".
Peu de temps après les faits, l'accusée commence à utiliser les pensions de retraite de sa mère, soit environ 146.000 euros sur 73 mois. Elle employait ses moyens de paiement, effectuait des retraits en liquide, ce qui lui vaut d'être également poursuivie pour escroqueries, faux et usage de faux documents administratifs aggravés.
Comme l'a expliqué un enquêteur de la brigade criminelle de Versailles, elle continuait de "la faire vivre administrativement", remplissant les déclarations d'impôts de feu sa mère, et répondant à ses courriers.
Le verdict est attendu lundi.