(Washington, correspondante)
Au lendemain de son troisième et dernier débat contre Barack Obama, John McCain a donné son opinion sur la rencontre. "J'ai trouvé que j'ai été plutôt bon hier soir, a-t-il dit jeudi 16 octobre, lors d'un rassemblement en Pennsylvanie. Mais parlons vrai : le vrai vainqueur a été Joe le plombier."
Aussitôt son équipe de campagne a diffusé une nouvelle publicité
Internet, à la gloire du héros du jour : Joe Wurzelbacher, 34 ans,
plombier à Holland, dans l'Ohio.A dix-neuf jours de l'élection, les républicains exultaient d'avoir
trouvé une nouvelle figure de l'Amérique moyenne à opposer à Barack
Obama. Joe le plombier a une carrure de footballeur et une maison de
banlieue des plus modestes, où il élève son fils. Quand le candidat
démocrate est passé faire du porte-à-porte dans son quartier, le 12
octobre, il l'a interpellé. "Je me prépare à acheter une compagnie qui fait entre 250 000 et 280 000 dollars par an, a-t-il dit. Avec votre plan, je vais payer plus d'impôts, c'est cela ?"Il s'est ensuivi un dialogue sur les mesures fiscales prônées par M.
Obama, au cours duquel le sénateur de l'Illinois a prononcé une phase
qui, par ces temps de recapitalisation des banques, paraît bien
anodine, mais qui a sonné comme un brûlot marxiste aux oreilles des
républicains. "Je pense que quand on répartit la richesse, c'est bon pour tout le monde."
Répartir? Les républicains ont largement diffusé les extraits du
dialogue et pendant le débat de mercredi, John McCain s'est emparé du
cas du plombier de l'Ohio pour montrer à quel point le programme
démocrate mettait en danger "le rêve américain". Barack Obama a répondu et le nom de "Joe le plombier" est revenu 23 fois en quatre-vingt-dix minutes. ARRIÉRÉ D'IMPÔTS ET IMPAYÉSAussitôt,
le téléphone s'est mis à sonner chez Joe Wurzelbacher. Et dès le matin,
il intervenait en direct dans les journaux. Il a refusé de dire qu'il
votait pour John McCain mais ses réponses n'ont pas laissé beaucoup
d'ambiguïté. "C'est une vision incroyablement socialiste, a-t-il
dit, en parlant du fait que les hauts revenus paieraient 3 % de plus
dans le plan de Barack Obama. Franchement pourquoi serait-on pénalisé
parce qu'on réussit ?" A ce stade, les camions satellites de la
presse avaient débarqué devant la maison du plombier. Dans tout le
pays, les titulaires du prénom "Joe" ont commencé à se sentir embarrassés, d'autant que Sarah Palin avait déjà assuré la publicité des "Joe six-pack"
de l'Amérique profonde (une référence aux packs de bière). La presse a
passé à la question les responsables locaux. La section 50 du syndicat
des plombiers a révélé que Joe n'avait pas de licence pour exercer. Le
greffier adjoint du tribunal du comté a indiqué qu'il avait un arriéré
d'impôts de 1 182 dollars, et une note impayée de 1 261 dollars à
l'hôpital local.Il s'est enfin trouvé que Joe s'appelait en fait
Samuel Joseph Wurzelbacher et que ses impôts baisseraient plutôt grâce
à Barack Obama… John McCain, lui-même, a fini par se moquer.
Intervenant au gala de charité de l'archevêché catholique de New York –
aux côtés de Barack Obama –, le sénateur républicain a annoncé qu'il
avait licencié tout son staff et décidé de le remplacer par Joe le
plombier.