Après plus de trois jours de garde à vue, deux frères de 10 et 11 ans ont été inculpés de tentatives de meurtre
et de vols, mardi 7 avril, par le tribunal pour enfants de Doncaster (Yorkshire du Sud). Ils n'ont manifesté aucune émotion tandis que leurs victimes, des enfants de 9 et 11 ans, sont encore à l'hôpital et que l'un d'eux a échappé de peu à la mort.
La journée de samedi s'annonçait pourtant sous les meilleurs auspices dans la petite ville ensoleillée d'Edlington. Les deux camarades avaient pris leur bicyclette pour aller pêcher. Ils ne sont jamais arrivés jusqu'au lac. Sur la route, ils ont croisé ceux qui allaient devenir leurs tortionnaires. Comme ils refusaient de leur donner leurs téléphones portables et les cinq livres qu'ils avaient en poche, leurs assaillants ont basculé dans la violence. Brûlures de
cigarette, coupures au couteau, morsures, coups... Le plus jeune des garçons a été retrouvé errant dans la rue, couvert de sang. Son copain, lui, gisait semi-conscient au fond d'un ravin.Les deux frères avaient été placés en famille d'accueil, il y a moins de trois semaines, dans cette ancienne région minière où un habitant sur cinq
vit d'allocations. Leur mère avait demandé de l'aide aux services sociaux, car elle disait ne plus pouvoir les contrôler. Le père, qui s'occupe de ses parents âgés, les voyait de temps à autre.Depuis leur arrivée à Edlington, ils s'étaient fait remarquer en semant le trouble dans la rue. Des plaintes avaient été déposées auprès des
services sociaux et de la police sans qu'elles fassent l'objet d'une attention particulière. Le petit Callam Flett,
âgé de 11 ans, avait notamment eu la peur de sa vie, il y a dix jours : les deux frères l'avaient bousculé puis frappé avant de lui dire qu'ils allaient le "tuer", a-t-il raconté à la presse anglaise. L'arrivée d'un adulte avait permis à l'enfant de s'enfuir.En Angleterre, comme au Pays de Galles et en Irlande du Nord, l'âge de responsabilité criminelle est de 10 ans. En Ecosse, il est en passe d'être relevé de 8 à 12 ans."C'est un acte barbare", a commenté Ed Balls, le ministre chargé de l'enfance. Gordon Brown s'est également ému de ce fait divers. Mais ses communicants ont tenu à préciser qu'il ne fallait voir dans cette sombre histoire qu'un "fait isolé" et non pas le symptôme d'une "société cassée", allusion au thème de campagne préféré de David Cameron, l'adversaire conservateur du premier ministre aux élections prévues d'ici à la mi-2010.Cette affaire oriente de nouveau les projecteurs sur les services sociaux de Doncaster, dont Ed Balls disait, il y a moins d'un mois, qu'ils présentaient encore de "sérieuses défaillances" auxquelles la toute nouvelle direction, mise en place en mars, n'avait pas eu le temps de remédier. Entre 2004 et 2008, sept enfants connus des services sociaux sont morts, dont une petite fille de 16 mois tuée par son père.
Un rapport interne de 2007 jugeait que les cas les plus vulnérables "étaient enterrés sous une pile de dossiers".
Virginie Malingre