Voyage en pays Fon avec Samuel Gaba-Chabi, notre
partenaire béninois : regard sans détour sur la réalité vécue au
quotidien par des populations rurales placées sous la menace permanente
du manque d’eau.
Je viens d’effectuer un périple de deux semaines à
travers le Bénin, du sud au nord et de l’est à l’ouest en passant par
le centre du pays.
Mon circuit m’a conduit de Cotonou à Bohicon, Dassa, Savalou, Bantè,
Bassila, Djougou, Natitingou, Tanguiéta, retour à Djougou, Partago,
Téprédjissi, Parakou, Savè, retour à Bohicon et Cotonou. Pour ceux qui
connaissent bien ou peu le Bénin, ils peuvent déjà avoir une idée de la
distance parcourue, de même que la variété de l’écosystème, de
l’habitat et aussi du comportement des hommes dans ces différentes
zones.
En ma qualité d’écologiste, j’ai été impressionné négativement par deux
importants phénomènes à savoir :
- L’impact de la sècheresse sur l’environnement
- Les attroupements des femmes et surtout des enfants autour des puits, au
bord des marigots, des rivières, des lacs et des fleuves, à la
recherche de l’eau pour la consommation et les travaux ménagers, sans tenir compte de la qualité de l’eau.
En attendant de revenir plus aisément sur chacun de ces aspects, je me
permets de vous faire ici un bref récit de mes observations sur le cas
de la pénurie d’eau pendant la saison sèche (du 15 octobre au 15 mai)
au Bénin, surtout dans les Départements des Collines et du Nord. Dans
cette zone, l’eau est devenue un très gros problème pour les
populations depuis plus de vingt ans que la sècheresse menace notre
pays. Un problème qui met en exergue plusieurs réalités et pose de
multiples questions.
La gestion de l’environnement pointée du doigtLa mauvaise gestion de l’espace rural, l’exploitation anarchique des
terres, des forêts, les cultures le long des cours d’eau sans aucune
précaution appropriée, le comblement des cours d’eau aggravé par la
longue sècheresse qui frappe le pays, sont quelques causes de la rareté
de l’eau dans notre pays et surtout dans les zones centre et nord
pourtant réputées
châteaux d’eau du Bénin.
L’eau : aussi une question de genre ?Dans plus de 90% des villages traversés ou visités, c’est le ballet des
bidons, des seaux, des tonneaux et autres récipients pouvant contenir
de l’eau (tous les volumes confondus) autour des points d’eau où c’est
la raison du plus fort qui règne pour pouvoir être le premier servi.
En général ce sont les femmes et les enfants qui sont affectés à cette
corvée que les hommes trouvent humiliante. En Afrique, et au Bénin en
particulier, jadis l’homme fût le maître absolu de son foyer et ne
s’occupait pas des travaux ménagers qui sont réservés exclusivement aux
femmes et enfants (surtout les filles). Cette situation a donné
naissance à un dicton en langue fon qui dit : « SOUNOU GLEGBENOU
GNONNOU HOUESSI » qui signifie littéralement « l’homme au champ et la
femme au foyer ». Actuellement, les choses commencent à changer surtout
dans les centres urbains où les femmes
ne se laissent plus faire.
Le nouveau code de la famille institue la femme comme étant l’égale de
l’homme, ce qui n’est pas encore d’application en milieu rural où
l’ancien système perdure.
De l’eau, oui mais laquelle ?Nous devons souligner que l’eau des forages et des puits privés ou
publics est vendue entre 0,25 et 2 francs CFA selon les lieux ; seule
l’eau des marigots, rivières et fleuves est gratuite mais très polluée
par les déchets en tous genres (ordures ménagères, déchets des
industries proches, empoisonnement des eaux par les pêcheurs en vue de
capturer plus facilement les poissons, ruissellement des eaux venant
des champs de coton ayant été traités avec des produits très toxiques
etc...). Malgré la mauvaise qualité de cette eau, certaines familles
sont obligées de la consommer et de l’utiliser pour tous leurs besoins,
car elles estiment qu’il vaut mieux garder les sous disponibles pour
d’autres problèmes plus sérieux (achats des condiments, des
médicaments, des fournitures scolaires, cérémonies familiales etc...)
Sans eau, pas de vieCes
observations m’ont permis d’évaluer l’importance de l’eau dans la vie
de l’homme « H ». Je peux maintenant affirmer que, sans eau, la vie
serait presque impossible sur cette terre, compte-tenu des services qui
nécessitent l’usage de cette ressource.
Pendant la saison sèche, il vous suffit de traverser le Bénin, vous auriez
pitié de tout ce que vous voyez : les hommes, les animaux, la
végétation, et les sols.
Le cas des animaux sauvages est encore très préoccupant, car certains à
la recherche de l’eau tombent à quelques mètres du point d’eau ou
meurent dans l’eau très boueuse qu’ils tentent de consommer. On assiste
partout à un spectacle désolant et insoutenable en raison du manque
d’eau.
L’eau devient alors une denrée prioritaire pour les populations.Que faire ?Face
au recul des périodes pluvieuses, les nappes d’eau commencent à
s’épuiser. Il importe donc que l’Etat et ses différents partenaires
conjuguent leurs efforts pour trouver des solutions idoines au plus
tôt.
Il s’agira d’évaluer objectivement les ressources en eau du pays, aussi
bien en surface que souterraines. Cette tâche incombe prioritairement à
l’Etat qui est le principal propriétaire de toutes les ressources de la
nation et qui doit veiller au bien être des populations.
En attendant cet éventuel projet salutaire, il serait heureux de voir
des bonnes volontés de toutes catégories (hommes d’affaires,
politiciens, associations de développement villageois, ONG nationales
et internationales,...) vivant avec les populations et connaissant bien
leurs problèmes, intervenir avant qu’il ne soit trop tard en apportant
leurs concours pour la réalisation de quelques points d’eau. Cela
permettrait de soulager un tant soit peu les douleurs de ces paisibles
et vaillants paysans qui ne demandent que de l’eau pour leur survie.
Il est bon de souligner les réalisations faites dans le cadre des
jumelages de certaines villes d’Europe, d’Asie, d’Amérique avec
quelques villes du Bénin, de même que des projets régionaux
d’hydraulique villageoise (Conseil de l’Entente ; C.E.D.E.A.O. ;
B.O.A.D. ; et autres institutions financières). Ces réalisations, bien
que non négligeables, ne comblent toutefois pas encore les attentes et
besoins des populations.
En guise de conclusionCe
périple de deux semaines m’a apporté beaucoup d’enseignements sur la
pénurie d’eau dans mon pays et m’amène à réfléchir sur les solutions
urgentes à apporter afin de vite soulager les paisibles populations.
En tant que simple citoyen, je me vois impuissant et désarmé devant
cette grave situation. Je fais appel donc aux hommes et femmes de bonne
volonté afin que des actions urgentes soient engagées.
Qu’on n’attende pas les périodes électorales pour aller solliciter les
populations avec de gros mensonges ! Il faut commencer à les aider
maintenant pour qu’elles soient plus vigoureuses avant les élections.
En effet, celui qui n’a pas d’eau dans sa chambre n’osera pas perdre
son temps pour aller voter en faveur d’un candidat qui, une fois au
pouvoir, ne songera plus à lui !
il y a des annees que cet article a été écrit...pourtant ces derniers jours nos freres du nord notemment djougou souffre d une penurie severe d eau...cause il ne pleut pas du tt la bas (pendant qu on souffre de trop de pluie ici) et le forage a baissé considerablement de niveau.Jusque la auccune mesure(envoie de camions citernes) n a encore été prise par le gouvernement.....