"La preuve est faite que le préservatif n'est pas une garantie à 100 % contre le sida", a expliqué André Fort, évêque d'Orléans, vendredi 27 mars, sur les ondes de France Bleu Orléans. "Vous le savez très bien, tous les scientifiques le savent : la taille du virus du sida est infiniment plus fine que celle d'un spermatozoïde", a expliqué l'évêque.
"On met maintenant sur les boîtes de cigarettes : 'Danger'. On devrait mettre sur les boîtes de préservatifs : 'fiabilité incomplète'", a-t-il ajouté. M. Fort a expliqué que ceux qui avaient vertement critiqué les propos de Benoît XVI "n'ont pas pris le temps d'entendre complètement ce que le pape disait". Des déclarations qui ont immédiatement déclenché une nouvelle polémique.
Les spécialistes du sida ont rapidement indiqué que le préservatif était totalement fiable lorsqu'il est utilisé correctement. "Le virus ne passe pas à travers la paroi du préservatif", explique ainsi le docteur Philippe Arsac, du Réseau sida du Loiret. Les propos de l'évêque relèvent d'"un discours qu'on entend depuis longtemps mais qui ne s'appuie sur aucun raisonnement scientifique valable", ajoute-t-il. "Les préservatifs vendus en France doivent avoir la norme NF. Leur qualité a été contrôlée."
"ANDRÉ FORT ADMET AVOIR COMMIS UNE ERREUR"
Après les "propos gravissimes" du pape Benoît XVI, "un nouveau cap vient d'être franchi", estime pour sa part le Parti socialiste dans un communiqué publié à Paris. "Ces propos sont non seulement faux mais également dangereux pour la santé publique", dit-il. "Le virus du sida ne peut pas traverser le latex (préservatif masculin) ou le polyuréthane (préservatif féminin)." Le PS demande au gouvernement de prendre des "mesures exceptionnelles d'information visant à rétablir la vérité afin d'éviter qu'une rumeur aussi fausse et dangereuse ne puisse se répandre, notamment chez les jeunes adultes".
M. Fort "fait partie de l'aile intransigeante conservatrice de l'épiscopat français, il est très proche des lobbies anti-avortement dits 'pro-vie'", a précisé Christian Terras, rédacteur en chef de la revue catholique protestataire Golias. Il déplore l'absence d'une "contre-offensive à la hauteur qui vienne contredire de manière manifeste ce qu'il raconte", en expliquant qu'"ils sont comme les révisionnistes sur les chambres à gaz : si on n'a pas d'éléments pour contrer ça [leur discours], quelque part ça sème le doute".
Face à la polémique, l'évêché d'Orléans a publié un communiqué pour expliquer qu'"André Fort admet avoir commis l'erreur de parler de questions posées dans des études (...) sur la perméabilité du préservatif", après un"article publié le 22 mars par un quotidien national [l'Osservatore romano, journal officiel du Vatican] qui informait d'une étude précisant que le préservatif n'était fiable qu'à 97 % dans les meilleures conditions d'utilisation et à 87 % dans
les conditions telles qu'elles se présentent en Afrique".
Il déclare cependant "prendre acte des déclarations expertes des spécialistes, qui, eux, attribuent ces échecs à d'autres causes". "Dans la lutte en faveur de la nécessaire éradication du sida, compter sur le préservatif et sur la recherche scientifique ne suffit pas", assure-t-il toutefois dans le communiqué. Floriane Cutler, de l'association Aides, s'étonne des chiffres cités par l'évêque. "Je ne vois pas comment on peut calculer la fiabilité du préservatif" et "présumer que cette fiabilité serait plus basse en Afrique est totalement infantilisant et faux si l'on se fonde uniquement sur les conditions d'utilisation", explique-t-elle, en admettant toutefois que "la qualité des préservatifs est parfois plus basse sur ce continent".